Agenda de la Nouvelle-Aquitaine à Paris

< Retour à l'agenda

Eric Laugerias, La team chocolatine !

Crédit photo Karo Cottier

 

Cognac, Angoulême, Brantôme, Bordeaux, Monclar-en-Agenais, Arrens-Marsous, Confolens… le parcours d’Eric Laugérias se lit comme une Carte du Tendre qui n’a rien d’imaginaire mais où l’on trouve l’amitié, le désir de s’amuser et la passion pour le théâtre et la gastronomie. Comédien, auteur, animateur, metteur en scène, il joue de ses multiples talents avec la politesse de s’en montrer heureux.

Sa mère, Michèle, était secrétaire de direction chez Remy Martin, son père, Gérard, a travaillé chez Hennessy avant de diriger le service des ventes de la Coopérative régionale de Saintes (les magasins COOP). Son frère Benoît qui est né comme lui à Cognac et a appris à marcher entre les ceps de vigne, a fait l’école de viticulture et d’oenologie au château de La Tour Blanche dans le Sauternais… Éric s’avoue lui-même plutôt incollable sur l’histoire des vins et du cognac, mais c’est vers les ivresses artistiques que s’est orientée son ambition professionnelle.

« Au départ, je voulais être journaliste. Je rêvais même de faire de la politique ! Pensionnaire au lycée Saint Paul à Angoulême, j’avais suivi les cours de théâtre parce qu’ils me donnaient l’occasion de sortir le soir ! C’est au bout d’une année à Sciences Po Bordeaux que le désir de jouer s’est fait sentir. Je suis allé m’inscrire au concours du Conservatoire André Malraux sur les quais, je visais les cours d’initiation à raison de douze heures par semaine et j’ai été admis à l’unanimité en classe pro. Là, ça devenait sérieux. Quarante heures de présence par semaine… J’ai dû faire un choix et mes parents qui étaient pourtant fiers que je fasse de "belles" études m’ont dit qu’il valait mieux avoir des regrets que des remords. Qu’il serait temps de revenir en fac si ça ne marchait pas. » 

Mais ça a marché. Raymond Paquet qui dirigeait la Compagnie dramatique d’Aquitaine a senti son potentiel et l’a engagé dans sa troupe. Le reste est une histoire de rencontres et de coups de coeur. Avec au départ le gang des Bordelais. Olivier Claverie, Nicolas Vaude, Nicolas Briançon. « On nous surnommait "les affreux Jojo" ! L’hiver, on suivait à Paris les cours de Jean Darnel au Théâtre de l’Atelier, l’été on parcourait les villages du Berry et de Dordogne, dormant par terre comme des boy-scouts. » Roger Louret les repère et leur dit : « Vous avez la dinguerie qu’on doit avoir à 20 ans, venez aux Baladins. » Epoque d’enthousiasme et de partage, de rires et de créations. Tout le monde voulait être dans la compagnie de Roger. Il y avait déjà l’ami fidèle Nicolas Marmié, sont arrivés Michel Fau*, Elie Seimoun, Muriel Robin, Annie Grégorio*, autant de noms qui font aujourd’hui les belles affiches du théâtre et du cinéma.

 

« Monclar-en-Agenais, ce petit coin de Gasconne a été une formidable école du théâtre et de la vie » se souvient Eric Laugérias.

crédit photo Jérôme Morel Lot-et-Garonne Tourisme

Monclar-en-Agenais crédit photo Jérôme Morel Lot-et-Garonne Tourisme

« On faisait tout nous-même en arrivant dans les salles des fêtes qui nous hébergeaient, on montait la scène, on lessivait le sol, on cirait les godasses, on faisait la tambouille de nos repas. On démarchait même les acheteurs au téléphone ! Quelle liberté alors, et on n’en avait rien à foutre de la différence entre le théâtre privé ou public. J’ai gardé cette liberté. J’ai pu ensuite jouer au Théâtre du Campagnol comme sur les Boulevards avec Jacqueline Maillan. »

Comédien. Mais pas que. Il peut être avec une étonnante énergie homme de TV et de radio, notamment aux Grosses Têtes de RTL avec Bouvard puis Ruquier, écrire des sketches pour Thierry Ardisson, pour Le vrai Journal (Canal+), chanter Ménélas dans La belle Hélène au Capitole de Toulouse dans une mise en scène de Jérôme Savary, livrer un récit humoristique 2012 Tout un monde (Ed Michel Lafon) qui se moque des prédictions alarmistes. Revenir encore sur scène avec Chantal Ladesou au théâtre de la Porte Saint-Martin dans la pièce Nelson qui lui vaut une nomination aux Molières. Il a créé en Avignon le spectacle Reggiani par Laugérias qui sera ensuite programmé au festival Les trois coups de Jarnac*, et il a signé un des gros succès de cette année 2023 en adaptant et en mettant en scène la pièce Ave César ! au théâtre Rive Gauche. La liste des films et téléfilms où il apparait est aussi longue que celle des pièces où il a joué. N’oublions pas ses stages 100% comédie qu’il anime chaque année.

Il ne renie pas ses racines aquitaines. Mieux, il les revendique. Et les transmet à ses fils, Pierre-Louis qui est comédien, Paul-Alexis qui se lance dans la restauration. « J’ai été élevé à la campagne, mon enfance s’est passée au grand air, j’ai voulu la même chose pour mes enfants. Avec mon épouse Sandrine (qui est décoratrice d’intérieur) on a trouvé refuge à moins d’une centaine de kilomètres de Paris, dans un petit village à côté de Vernon. »

Parmi les joyeux souvenirs d’Éric, Radio Feuille de Vigne, la radio qui n’a rien à cacher !  pour laquelle, encore lycéen, il avait couvert le premier festival du film policier de Cognac. Il évoque avec nostalgie la vallée de la Dordogne, Brantôme et Condat-sur-Vezère où sont nées sa grand-mère et sa tante, le col du Soulor où il allait en colonie de vacances, Gourette et Arrens-Marsous dans le Béarn pour les vacances d’hiver non loin de Nay, pays natal de son grand-père.

« Je suis de la team chocolatine. Dès que je dépasse Poitiers, je commence à avoir des frémissements. Tout se réveille en moi, la bonne bouffe, le rugby, l’accent, l’esprit des Mousquetaires avec ces caractères forts à l’image des paysages et du climat.»

C’est dans cet esprit « Un pour tous, tous pour un » qu’il va redonner vie au théâtre de Ménilmontant où la môme Piaf avait chanté pour la première fois. « J’ai été gâté par la vie, je veux pouvoir donner autant que j’ai reçu… »

Lire le portrait d'Eric Laugerias

Recueilli par Régine Magné

*Retrouvez les portrait de Pierre Bonnier, Michel Fau et Annie Grégorio, dans le recueil des interviews !