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Mathieu Bosredon - Graine de champion

De son handicap il a fait un atout. Pour remporter des compétitions nationales et internationales, repousser les limites de l’impossible, mener sa vie comme un pilote de formule 1 avec les records de vitesse dans la ligne de mire de son guidon de handbike.

Mathieu Bosredon…bien prononcer le «s» de son nom, il y tient, est devenu un champion qui inspire le respect et l’admiration.

Ce n’était pas gagné d’avance pour le jeune Corrézien. Il a 4 ans lorsqu’on lui diagnostique un hématome modulaire. La moelle épinière compressée entraine une paraplégie incomplète. Dix-huit mois en rééducation ne lui rendent pas l’usage de ses jambes, il se déplace en rampant sur le sol et grimpe les escaliers en « mode Tarzan » comme il s’amuse à le préciser. Valérie et Thierry, ses parents, refusent de le laisser s’apitoyer sur son sort. « Ils ne m’ont pas épargné, ils m’ont traité comme mon frère et ma sœur, avec peut-être un peu plus de dureté » dit-il reconnaissant. « Maman a surmonté avec brio le drame de sa vie, avoir un fils handicapé ».

Il a 12-13 ans lorsque Thierry l’initie au handbike. Il a déjà un fauteuil roulant, il peut ajouter le vélo qu’il pratique allongé en pédalant à la force de ses bras de futur d’athlète. Il mène une scolarité normale, école primaire d’Yssandon où il est né voici 31 ans, collège de Larche, lycée Cabanis à Brive, licence de commerce à Chambéry, rien ne doit lui être fermé selon la volonté de ses parents qui ne roulent pourtant pas sur l’or. « Je n’ai pas cherché à y aller doucement, je suis parti à fond dans tout ce que j’ai entrepris ! ».

« J’ai la chance d’avoir grandi dans une famille extraordinaire qui me laissait beaucoup de liberté. Gamin, je pouvais partir toute la journée retrouver les copains pour jouer dans les champs ou dans les granges. Je faisais 10 km à vélo d’une ferme à l’autre. » Une vie d’enfant tout à fait normale à laquelle son père, électricien, apporte le goût de l’aventure et des défis.

« Il m’a appris à me surpasser, à oublier mon corps blessé. J’ai fait de la natation, du char à voile, du ski nautique et alpin, j’ai descendu l’Ardèche en canoë et à 16 ans, j’étais déjà allé au Mali et au Chili ! »

Spécialisé dans la course en ligne en longue distance et contre la montre, Mathieu collectionne les victoires. Double champion de France, champion du monde, 4eme place aux JO de Rio, un malheureux accident l’empêche d’être sélectionné pour Tokyo, il a repris encore plus intensément l’entrainement pour les JO de Paris en 2024. « Mon rêve est d’en repartir avec une médaille autour du cou, devant ma famille et mes amis qui seront dans le stade. »

Une fin de carrière en apothéose ? Il le mérite. Et après ? Il hésite entre bosser dans une société qui étudie l’adaptation de l’habitat aux handicapés ou s’installer à son compte comme artisan dans la métallurgie. Pour l’heure, il continue de parcourir les routes au gré des compétitions. « Les voyages ça me connait. Je fais au moins 50 000 km par an en voiture, sans compter les avions ! »

Mais son plus grand bonheur est de rentrer chez lui, de retrouver son épouse Aurélie et leur fils Lorenzo, 11 ans. « On a une vie heureuse tous les trois. » Aurélie est danseuse, ils se sont rencontrés dans le Café de l’avenue de Paris, revus à un spectacle... « Et on ne s’est plus quittés » précise-t-il en riant. Il est fier d’Aurélie qui donne des cours de danse au-dessus de sa boutique Le Cinquième Art à Brive. Elle a même réglé la chorégraphie des clips que Patrick Sébastien a tournés à Saillac.

« Ma réussite, je la dois à beaucoup de travail et d’acharnement, elle, à son talent et sa sensibilité. »

Dans la famille Bosredon, il ne faut pas oublier le frère aîné Yoann, ingénieur, qui trimballait le petit Mathieu à l’arrière de son scooter, ni la benjamine Margaux, artiste qui a remporté des concours de chant à Brive. Fratrie dans laquelle il a puisé son équilibre. Le home trainer et ses capteurs de puissance installé dans son garage lui permet de s’entrainer par tous temps, mais rien ne remplace les sprints entre les champs de maïs, sur les routes bordées de peupliers, dans ces paysages coupés de haies vives.

« Je passe tous les jours à vélo au bord du lac de Causse, un cadre exceptionnel ». Il aime emprunter le petit pont de Le Saillant et ses six arches sur la Vézère, apercevoir au loin la tour César, vestige de l’ancienne forteresse vicomtale de Turenne. « Quand on a grandi dans un tel cadre, il est impossible d’avoir envie d’aller vivre ailleurs, et ceux de mes copains d’enfance qui étaient partis sont vite revenus ! »

Lac du Causse  ©RAMSHORN Office de Tourisme de Brive

« Je suis amoureux de ma Corrèze » avoue Mathieu Bosredon.

Une confession dont il semble tirer sa plus émouvante fierté.

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Recueilli par Régine Magné.